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La moto et la pluie

 
(@christian7)
Membre

Quand j'ai commencĂ© Ă  faire de la moto, je voyais la pluie  comme une perturbatrice, voire comme une ennemie.

Au fil des années, je me suis rendu compte qu'elle pouvait accompagner le motard dans son voyage, qu'elle participait à créer une atmosphère particulière et que l'on pouvait éprouver du plaisir à rouler sous la pluie.

C'est ainsi que j'ai pu vivre de beaux moments mĂŞme dans des conditions climatiques difficiles.

J'ai d'ailleurs le souvenir d'une magnifique journée au cours de laquelle j'avais connu un état de grâce et elle m'avait inspiré ce petit texte:

 

 

 

 

 

 

 

 

Elle faisait partie de ces journées qui minent le moral. Celles où la pluie semble être là depuis et pour toujours. Celles où la lumière reste allumée dans les maisons pour lutter contre une nuit qui ne dit pas son nom.

Celles où l’on hésite à quitter la douce chaleur de la couette , où l’on prolonge le petit déjeuner près du poêle à bois en écoutant le bruit des flaques d’eau soulevées par les pneus des voitures qui passent sous les fenêtres de l’appartement.

Pourtant, il savait que sa journée allait se dérouler à l’extérieur. Alors, plus lentement que d’habitude, il prépara ses affaires et s’habilla, méticuleusement, en enfilant les couches de vêtements.

En ouvrant la porte d’entrée du petit immeuble, il fut saisi par le froid teinté d’humidité. Il rejoignit à pied le garage, rasant les murs pour tenter de rester au sec.

Sa moto noire et rouge l’attendait sagement, posée sur sa béquille latérale. Il installa ses deux sacs sur le porte bagages pendant que le moteur chauffait dans le martèlement de son V-twin à 45 degrés.

Il enfila sa combinaison de pluie, ses gants de cuir et glissa ses mains dans les manchons.

Clonk ! Une pression sur le sélecteur et il accéléra doucement sur le sol glissant.

Il sortit rapidement de la ville et entama les 100 kms qui le séparaient de Riom. Une longue ligne droite, monotone que la pluie incessante rendait encore plus triste. Il essaya, avec peu de succès, de ne pas se focaliser sur ce temps pourri, cette visibilité réduite, avec le souvenir de la journée ensoleillée de la veille.

De temps en temps, le vent forcissait et l’obligeait à se crisper un peu sur le guidon ; à chaque fois, il pestait contre l’abruti qui commandait le climat, tout là haut.

Arrivé à Riom, il bifurqua vers l’ouest, direction Pontgibaud. La route se fit plus accueillante, à travers ses dénivelées et ses nombreux virages. Elle s’enfonça dans la forêt dénudée de ce mois de décembre.

Il aborda avec prudence les premières courbes, attentif aux changements d’adhérence, aux quelques feuilles mortes parsemant la route. Peu à peu, l’esprit trop occupé à son pilotage, il oublia la pluie et le froid.

Imperceptiblement, le rythme devint plus soutenu. Il enchaîna une succession de virages avec des trajectoires précises ; il avait l’impression qu’il pouvait placer ses pneus là où il l’avait décidé, au centimètre près.

Parfois, la pluie redoublait de violence, mais c’était comme s’il ne la voyait plus.

Il ne ressentait plus la morsure du froid.

Plus de crainte, de douleur ou de doute dans sa tête. Il n’y avait que cette route qui s’offrait à lui.

Parfois, une voiture le ralentissait ; une petite impulsion sur la poignée de gaz et l’obstacle était effacé. Au passage, il jetait un coup d’œil à l’habitacle de l’automobile et il plaignait les passagers qu’il apercevait derrière les vitres embués.

Il traversa un village. Les rares passants hâtaient le pas sur les trottoirs détrempés. A la sortie de l’agglomération, un enchaînement de virages s’offrait à lui.

Il prépara mentalement le virage à droite qui allait se présenter dans quelques instants. Il le connaissait pour avoir emprunté à plusieurs reprises cet itinéraire. Il voulait y arriver à la bonne vitesse, celle qui lui permettrait de l’aborder sans avoir à freiner, ni, accélérer, celle qui lui donnerait le tempo pour la succession de courbes plus ou moins prononcées qui allaient suivre dans cette montée bordée par la paroi rocheuse, sur sa droite.

Il pensa au calligraphe qui devant sa feuille vierge, reste un long moment, immobile, préparant son esprit, qui pose son pinceau et , avec des gestes précis, sans rupture dans le rythme, trace les lettres à l’encre.

Lui aussi, il se sentait dans la peau de celui qui dessine ; sa moto devenait son pinceau et il la guidait avec tout son corps pour tracer des courbes élégantes. Seule sa poignée de gaz était mise à contribution, il s’interdisait le levier de frein car il ne voulait pas rompre l’intensité de ce moment, par des changements de rythme qui lui auraient paru déplacés . Il ne pouvait s’empêcher de penser que le spectacle devait être beau, vu du bord de la route. Les nombreux arbres de la forêt corrézienne assistaient, imperturbables, au passage de ce motard solitaire en état d’euphorie.

Régulièrement, il regardait le sillon laissé par ses pneus sur le bitume détrempé.

Il poursuivit ainsi son chemin, avec la conscience de vivre un moment exceptionnel. Il ne voulait pas s’arrêter, de peur de rompre cet instant rare où il se sentait capable de tutoyer les sommets du bonheur. Tel le musicien jouant sa partition avec grâce, tel le coureur de fond dont les chaussures frôlent plus qu’elles ne touchent le revêtement.

A l’entrée de Tulle, la station d’essence le ramena à la réalité. Son réservoir était quasiment vide.
Il fit le plein et se réchauffa près de la caisse, avec un chocolat chaud dans son gobelet en plastique.

Encore 350 kms avant d’arriver chez lui. Il savait déjà qu’il n’était pas prêt de retrouver cet état de grâce rencontré deux heures durant sur cette portion de route.

Mais le froid, la pluie, la nuit proche ne pourraient effacer cette communion unique entre l’homme, sa machine et les éléments.

Le bonheur est parfois tout près, là où on ne l’attend pas, dans la grisaille d’une journée de décembre.

 

 

Citation
Début du sujet Posté : 16 septembre 2013 00:32
(@jac1300)
Membre

 

Grand voyageur,Grand photographe et Grand ecrivain

Ton texte nous decit tres bien les sensations d un motard sur ca machinne,,,

mais pour rire ici chez nous en Decembre les chances de rouler sous la pluie

sont plutot rare,puisque de par la loi le 15 decembre nous ne pouvont plus rouler

et que la neige recouvre souvent nos routes.

 

NB.la loi nous oblige a avoir des pneus d hiver,et comme on le sait tous ca n existe pas pour les motos les pneus d hivers

du 15 decembre au 15 mars....mais nous devont quand meme payer les frais annuel pour le droit de circuler 12 mois

en ayant seulement la possibilité de rouler 8 mois a cause de la loi des pneus d hivers

RĂ©pondreCitation
Posté : 16 septembre 2013 03:35
(@ballaz)
Membre

Bah.. On paie pas vraiment 12 mois vue que les mois d'hivers sont "gratuits" c'est pour éviter les remisage/déremisage pour rien. Tu plaquerais seulement les 9 mois autres que ceux d'hivers et ca te couterait le meme prix. Sauf erreur. C'est une madame de la Saaq qui m'avait dit ca un bon jour.

Pour la pluie moi j'aime bien rouler sous mais la seule chose que je déteste c'est que ca salit la moto bcp plus et que ca risque d'être long pour la remettre toute propre. Je ne suis pas un de ceux qui adore frotter.

RĂ©pondreCitation
Posté : 16 septembre 2013 04:24
(@lekid)
Membre

Svp, on reste dans le sujet de Christian7 qui nous parle de moto sous la pluie.... Acute

Plusieurs autres discussions sont dĂ©jĂ  existantes sur les pneus d'hiver et nul doute que d'autres sont sur le point de revenir... Merci Good

RĂ©pondreCitation
Posté : 16 septembre 2013 04:55
(@christian7)
Membre

 
Grand voyageur,Grand photographe et Grand ecrivain
Ton texte nous decit tres bien les sensations d un motard sur ca machinne,,,
mais pour rire ici chez nous en Decembre les chances de rouler sous la pluie
sont plutot rare,puisque de par la loi le 15 decembre nous ne pouvont plus rouler
et que la neige recouvre souvent nos routes.
 
NB.la loi nous oblige a avoir des pneus d hiver,et comme on le sait tous ca n existe pas pour les motos les pneus d hivers
du 15 decembre au 15 mars....mais nous devont quand meme payer les frais annuel pour le droit de circuler 12 mois
en ayant seulement la possibilité de rouler 8 mois a cause de la loi des pneus d hivers

 

Quatre mois sans rouler..... un véritable cauchemar pour moi!

J'ai de la chance d'avoir un climat tempéré dans ma région et de pouvoir rouler 12 mois sur 12. Un bon équipement, des manchons, voire des poignées chauffantes et c'est bon!

Il m'est arrivĂ© Ă  deux reprises de rouler dans des conditions "quĂ©becoises". C'Ă©tait en allant Ă   la concentration hivernale des Elephants en Autriche.  Une nuit entière Ă  rouler par moins 20 degrĂ©s, je m'en souviens encore! Et sans manchons et poignĂ©es chauffantes Ă  l'Ă©poque.

Ce fut un voyage inoubliable qui, lui aussi, m'avait inspiré ce petit texte.

 

 

 

 

 

 

 

Le réveil, insistant, le tira d’un trop court sommeil. Mais, c’est avec joie qu’il se retira des draps douillets à 2 heures du matin.

Avec précaution, pour ne pas réveiller ses parents, il descendit l’escalier de bois qui grinça doucement sous ses pas feutrés.

Il aperçut sa moto, au fond du garage, qui semblait l’attendre, les sacoches en skaï déformées par le chargement.

 

 

Honda 125 CG  Salzbourg

 

Il pénétra dans la cuisine et alluma la radio pour arrêter le silence ambiant.

Il prépara avec un soin particulier le petit déjeuner, comme pour calmer l’excitation qui s’installait en lui. Il pressa deux oranges et mit la casserole de lait sur le feu. Il laissa le liquide frémir et assista à sa montée dans le récipient. Il éteignit le gaz au tout dernier moment, juste avant que le lait ne déborde.

Il posa le vieux bol fêlé, souvenir de la maison de ses grands-parents, avec une pensée pour eux.

La chatte de la maison le rejoignit ; il fut heureux de sa présence, et se surprit à lui parler.

« Je ne pars que pour une petite semaine ».

Elle grimpa sur la toile cirée de la table et attendit patiemment qu’il ait terminé son chocolat chaud. Elle savait qu’il laisserait un fond du breuvage qu’elle pourrait laper.

Il fit ensuite un passage Ă©clair dans la salle de bain ; il avait pris une bonne douche avant de se coucher et ne voulait pas trop se retarder.

Sur une des chaises du salon, ses vêtements l’attendaient ; il les enfila méthodiquement, en prenant garde à bien les recouvrir de façon à ne laisser passer aucun filet d’air.

Enfin, il revêtit sa veste et son pantalon de barbour à l’odeur caractéristique. La veille, il avait procédé à leur entretien en les graissant généreusement avec de la graisse de phoque.
La cagoule de soie noire finalisa son harnachement.

Il ouvrit la lourde porte de bois du garage et sortit sa moto.

Dehors, la nuit était noire et il fut saisi par le froid de ce mois de février. Il alla chercher la clef de contact, à gauche sous le réservoir bleu, leva la tirette du starter au niveau du carbu. Il déplia le kick et ; d’une poussée franche le rabaissa. Le petit monocylindre se réveilla dans ce bruit feutré qu’il appréciait tant.

Il enfila ses gros gants d’hiver et enfourcha sa moto. Une pression sur le sélecteur, le voyant de point mort s’éteignit ; il relâcha doucement le levier d’embrayage.

Il Ă©tait parti. Enfin !

Il traversa sur un filet de gaz la ville endormie. Progressivement, il s’éloigna des artères éclairées. L’obscurité et le froid le saisirent sur cette route déserte. Il comprit que le long chemin qu’il entreprenait allait être parsemé d’embûches mais cela ne le découragea pas. Au contraire, il se sentait armé pour affronter les 2000 kilomètres qui l’attendaient jusqu’à cet endroit mythique, quelque part en Autriche.

Son minuscule phare diffusait une vague lueur devant lui. Les traversées de villages, il les recevait comme une pause dans son combat contre le froid. Il diminuait la vitesse, la température gagnait quelques degrés et l’éclairage public finissait de le réchauffer.

Régulièrement, il faisait une pause sur le bord de la route pendant laquelle il frappait dans ses mains pour tenter de retarder leur engourdissement.

Enfin, son horizon s’agrandit et il commença à distinguer son environnement ; les première lueurs annonciatrices de l’aube arrivèrent comme un cadeau et il se surprit à chanter sous son casque pour fêter la fin de cette nuit d’encre.

Le ciel prit une couleur bleu foncé et quelques nuages aux tons de rose s’installèrent au dessus des collines avoisinantes. Il guetta avec une certaine impatience l’arrivée du soleil. Enfin, ce dernier sembla sortir de terre et envoya ses premiers rayons sur la visière de son casque.

Il s’arrêta au premier café et commanda un chocolat chaud. Quelques clients buvaient leur café du matin, accoudés au comptoir.

Alors qu’il enserrait avec délice la tasse brûlante de ses mains gelées, il eut conscience de son décalage avec ces personnes sur le point de rejoindre leur lieu de travail. Il en oublia les morsures du froid.

La journée se poursuivit dans une douce euphorie. Le soleil omniprésent lui donnait des ailes. Son corps réchauffé se détendait .

 

La lumière du jour déclinait alors que l’équipage entamait la montée du col de Montgenèvre. Le soleil l’abandonna au détour d’un virage et il sentit la fatigue l’envahir.

Il s’arrêta dans le petit café de Briançon, occupé par quelques joyeux papys qui jouaient aux cartes en discutant bruyamment. Il se sentit bien dans cette atmosphère chaleureuse. Il alla demander au patron s’il pouvait planter sa tente dans un pré voisin.

L’homme partit d’un grand rire.

« Malheureux, tu va mourir de froid, le thermomètre est descendu à moins 18 la nuit dernière ! ».

Près de lui, un joueur releva la tête et lui annonça : « Je vais t’héberger, petit. J’ai une chambre de disponible dans ma maison et je m’en voudrais de te laisser mourir de froid ».

L’homme plongea la louche dans la grosse marmite noircie placée au dessus du feu dans la cheminée . Il remua la soupe qui mijotait dans la grande cheminée de la pièce principale de la vieille maison.

Il semblait heureux d’avoir invité ce motard. C’était l’occasion pour lui de mettre un peu de vie à sa soirée.

Pendant qu’il remplissait les assiettes, il le questionna sur sa présence ici, en plein cœur de l’hiver. Son interlocuteur lui parla de cette grande manifestation qui réunissait les motards européens près de Salzbourg, de son rêve d’y participer depuis qu’adolescent, il avait lu un article sur cette concentration. Il avait pu se libérer une semaine en séchant quelques cours de fac et réalisait enfin ce projet qui le tenait à cœur.

Devant le feu qui crépitait, il écouta ensuite le vieil homme lui raconter sa rude vie de berger dans cette région de montagne.

Le lendemain matin, très tôt, les deux hommes se retrouvèrent au petit déjeuner.

Le jour était levé, il était temps de reprendre la route. La selle de sa moto avait blanchi, le froid était vif. Il serra chaleureusement la main du montagnard .

Ce dernier lui dit simplement :
« Sois prudent, petit ».

Il pesa de tout son poids sur le kick mais celui-ci, bloqué par le froid, refusa de fonctionner.

Heureusement, la rue était en pente et il laissa la moto prendre de la vitesse, puis embraya, sur le troisième rapport. Le moteur se réveilla dans un bruit métallique inquiétant ; Il supposa que l’huile était figée avec une telle température négative et il le laissa tourner longuement avant d’entamer sa route vers l’Italie proche.

Il descendit le col avec prudence, attentif aux nombreuses plaques de verglas. Un sentiment de liberté sans limite l’envahissait.

Il roula toute la journée, au rythme tranquille de sa petite 125. Parfois, il s’extasiait à la vue des vieilles Moto Guzzi Falcone, à moteur horizontal, souvent conduites par de vieux messieurs et dont le pom-pom grave résonnait dans les rues des villes traversées. L’Italie semblait être Le pays de la moto.

Il apprécia tout particulièrement la route qui longeait le lac de Garde alors qu’il se dirigeait vers l’Autriche. Enfin, il arriva au poste frontière. La nuit s’installait et le froid avec.

Il fit la rencontre d’un motard, un Italien, tout jeune retraité qui, pour fêter la fin de son activité, avait décidé de rejoindre son fils parti quelques jours plus tôt, à cette célèbre concentration des Elephants, au guidon de son V-twin Guzzi.

Il s’appelait Capel, était rempli d’enthousiasme. Ils décidèrent d’un commun accord de rouler ensemble jusqu’à Salzbourg.

L’épreuve commença. Le thermomètre du poste frontière indiquait déjà –14 degrés.

La nuit fut un long combat contre le froid, ponctué par des arrêts réguliers obligatoires dans les cafés.

Ils rentraient, transis, dans ces lieux surchauffés, tentaient de se réchauffer à coup de chocolats chauds. De plus en plus difficilement au fur et à mesure de l’avancement de cette nuit interminable, il devenait douloureux de renfiler leur équipement pour affronter l’air glacial de l’extérieur. Ils savaient que , dans quelques minutes, les doigts commenceraient à être engourdis et qu’ils allaient se battre pour résister le plus longtemps possible avant d'abdiquer dans un prochain café.

Les kilomètres défilaient lentement sur le petit compteur du CG ; parfois, quelques plaques de neige semblaient surgir du néant et occasionnaient des montées d’adrénaline. Le ridicule phare de 25 watts était impuissant à percer cette nuit d’encre.

A aucun moment, il ne regretta de s’être embarqué dans cette épreuve ; il se contentait de mettre toute son énergie dans cette lutte contre ce froid qui le transperçait.

L’arrivée de l’aube fut vécue comme une délivrance et il frémit de bonheur lorsque les premiers rayons de soleil éclairèrent la campagne environnante.

Encore quelques kilomètres et ils arrivèrent à une bifurcation. A partir de là, la route était complètement enneigée sur les derniers kilomètres. Capel se laissa surprendre et ne put retenir sa lourde moto. Une chute sans gravité.

Enfin, il y eut la traversée d’un petit tunnel d’accès au circuit de Salzbourg.

Là, ce fut le choc. Des centaines de motos et de tentes dans cette étendue enneigée, des feux de bois.

Il se hâta de monter sa tente ; il était impatient de se promener sur le circuit.

Toute la journée, il put admirer les motos présentes et s’imprégner de l’ambiance. Les transformations les plus ingénieuses ou les plus farfelues étaient monnaie courante ici.

Il ne ressentait pas la fatigue de sa nuit blanche.

Le froid s’installa avec la nuit et il s’engouffra tout habillé dans son sac de couchage. Il passa une nuit agitée, transi.

Très tôt le matin, il se leva. Ses voisins avaient déjà allumé le feu. Au moment d’enfiler ses bottes, il dut se rendre à l’évidence que, durcies par le froid, elles opposaient une résistance farouche. Il se rapprocha près des flammes pour les assouplir.

« La température est descendue à –20 degrés » lui annonça-t-on.

Il resta longuement près du foyer en regardant la vie s’installer sur le circuit. Il serait volontiers resté une journée de plus mais le temps lui manquait.

Alors, il chargea son petit mono tout givré. Il ressentait une certaine fierté devant les regards admiratifs de ses voisins, tous propriétaires de grosses cylindrées. Il encouragea mentalement son petit moteur qui dut l’entendre car il démarra sans coup férir à la première impulsion sur le kick. Il eu droit à quelques pouces levés en l’air en signe de félicitation. Il était sur son petit nuage.

Enfin, il découvrait l’Autriche de jour et il emprunta les petites routes, traversant de nombreux villages. La neige recouvrait les prés et il rencontrait parfois des personnes faisant du ski de fond. Le soleil avait décidé de l’accompagner et il se laissa bercer par la douce atmosphère de cette journée de février.

Peu avant la frontière, il s’arrêta dans une station d’essence. Pendant que le pompiste faisait le plein, il remarqua le pré attenant.

Avec forces gestes, il lui demanda s’il pouvait s’y installer pour y dormir.

Son interlocuteur, après lui avoir vainement conseillé un hôtel un peu plus loin, l’autorisa à s’installer. Il semblait interloqué par cette demande inhabituelle.

Ce soir là , la tente resta sur le porte bagages et il s’engouffra dans son sac de couchage avec le plus beau toit du monde au dessus de sa tête.

Lorsqu’il ouvrit les yeux, il aperçut, de l’autre côté de la route, un groupe de personnes devant l’arrêt de bus.
Conscient du spectacle insolite qu’il présentait, il se leva et chargea rapidement sa moto, devant les regards étonnés.

De nouveau, la route. Encore 1400 kilomètres à effectuer et un impératif : être à la maison demain soir, pour reprendre ses cours de fac.

Une nouvelle nuit blanche se profilait à l’horizon, mais, loin de l’inquiéter, la perspective de cette longue route le remplissait de joie. Le cœur léger, il parcourut les belles routes du nord de l’Italie sous un beau soleil qui réchauffait l’atmosphère hivernale.

La journée se déroula comme dans un rêve.

L’obscurité naissante, la vision de quelques nuages menaçants eurent raison de son enthousiasme. Il se sentit soudain mois fringant face aux Alpes qu’il allait devoir franchir de nuit Le petit monocylindre grimpa le col à allure d’escargot.

Alors qu’il traversait lentement la ville de Briançon, un automobiliste le dépassa et s’arrêta plus loin. Il sortit de sa voiture un peu plus loin en lui faisant de grands gestes pour l’inviter à s’arrêter.

Intrigué, il stoppa près de l’homme qui lui demanda s’il revenait de la concentration des Eléphants.
« J’y étais moi, aussi et je suis rentré hier . Suis moi, viens te réchauffer à la maison ».

La soupe brûlante avait un goût divin et il la dégusta lentement.
Il dut faire un effort surhumain pour quitter cet appartement douillet dans lequel régnait une douce chaleur et retrouver l’obscurité et le froid.

La nuit lui parut interminable. La route sinueuse, le phare ridiculement faible, la fatigue accumulée constituaient un cocktail détonnant ; ses trajectoires devenaient hésitantes et il luttait contre le sommeil. Quand il commença à voir la route tanguer sous son regard, il comprit qu’il devenait urgent de s’arrêter.

Il aperçut un parking sur lequel stationnaient quelques poids lourds.

Il descendit de sa moto comme un zombie, déroula son sac de couchage à même le sol, jeta un œil à sa montre. Il était 4 heures. Et il s’écroula dans un sommeil profond, instantanément.

Ploc ; Ploc. Quelques gouttes s’écrasèrent sur son visage et le réveillèrent brutalement. Le cadran de sa montre indiquait 4H20. La météo lui avait accordé vingt malheureuses minutes de sommeil.

Il replia rapidement son sac de couchage et reprit la route. Etonnamment, sa fatigue semblait l’avoir quitté et il put assister à la fin de cette nuit interminable.

Le jour n’était pas encore là quand il traversa la place d’un village. La devanture éclairée du café l’attira comme un aimant et il s’engouffra dans la salle pour y dévorer six croissants et un chocolat chaud, sous l’œil mi intrigué, mi amusé du serveur.
Il réalisa qu’il devait avoir bien triste mine après tous ces kilomètres et ces courtes nuits de repos.

Le soleil s’invita et lui donna des ailes pour terminer sa dernière journée de route. L’arrivée de plus en plus proche du domicile familial lui donnait des ailes.

A 70 kilomètres de l’arrivée, alors qu’il se laissait glisser dans la longue ligne droite qui longeait les Pyrénées, une voiture de gendarmerie le dépassa ….. puis serra la petite moto tout en ralentissant, jusqu’à coincer l’équipage contre la rail de sécurité . Les deux gendarmes sortirent du véhicule, lui demandèrent les papiers et entamèrent leur contrôle un brin soupçonneux. Enfin, après les avoir questionné sur la raison d’une intervention aussi brutale, ils lui avouèrent qu’ils étaient à la recherche d’un voleur qui avait dévalisé une banque dans la matinée et s’était enfui au guidon d’une moto bleue.

« Ma moto n’est peut-être pas l’engin idéal pour s’enfuir » leur répliqua-t-il en souriant, tout en leur montrant le petit moteur et les nombreux bagages.

Plus que quelques kilomètres, les premières maisons de sa ville et , enfin, le portail ouvert de la demeure familiale.

Vite, un bain brûlant !

 

elepha10

 

RĂ©pondreCitation
Début du sujet Posté : 16 septembre 2013 05:45
PatM
 PatM
(@patm)
Membre Admin Registered

Je suis bien d'accord avec toi que de ne pas sortir rouler à moto s'il pleut nous fait souvent manquer de belles journées. Il faut voir la pluie comme faisant partie de l'aventure.

Merci de tes récits Christian.

Ride Safe!

RĂ©pondreCitation
Posté : 16 septembre 2013 07:24
(@gillesrrider)
Membre

Je suis bien d'accord avec toi que de ne pas sortir rouler à moto s'il pleut nous fait souvent manquer de belles journées. Il faut voir la pluie comme faisant partie de l'aventure.
Merci de tes récits Christian.

Bien vrai Pat, car samedi certains pensaient rester à la maison pour finalement partir et avoir une superbe journée, quelques-uns ont goûté à la pluie . Au final une superbe journée sur la route + un souper mémorable en bonne compagnie dans une brasserie artisanale ou la nourriture était délicieuse.

RĂ©pondreCitation
Posté : 16 septembre 2013 09:42
(@lekid)
Membre
PatM a ecrit:

Je suis bien d'accord avec toi que de ne pas sortir rouler à moto s'il pleut nous fait souvent manquer de belles journées. Il faut voir la pluie comme faisant partie de l'aventure.
Merci de tes récits Christian.

Bien vrai Pat, car samedi certains pensaient rester à la maison pour finalement partir et avoir une superbe journée, quelques-uns ont goûté à la pluie . Au final une superbe journée sur la route + un souper mémorable en bonne compagnie dans une brasserie artisanale ou la nourriture était délicieuse.

C'Ă©tait sans compter qu'au lendemain de cette journĂ©e, j'en ai fait une autre oĂą encore une fois la pluie (sous une tempĂ©rature autour du 10 degrĂ©s), Ă©tait bien prĂ©sente.  Pourtant, que des sourires durant toute la randonnĂ©e sur les quelques visages qui avaient osĂ©.  

Mais j'avoue que seul, je n'ai pas autant l'envie de mouiller le bĂ©clque.  Mais avec des amis, ça prend une toute autre dimension. Drinks

RĂ©pondreCitation
Posté : 16 septembre 2013 12:04
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